Assurance Dommages-Ouvrage : comment ça marche ?
Vous souhaitez rénover votre maison ?
Vous vous apprêtez à concrétiser votre projet de construction ?
Il convient alors de respecter quelques formalités avant de vous lancer corps et âme dans cette aventure !
L’adage « nul n’est censé ignorer la loi » est bien connu de tous.
Pourtant, rares sont ceux qui connaissent leurs obligations et leurs droits, notamment dans le domaine de la construction.
Saviez-vous par exemple qu’il vous appartient de souscrire à une assurance Dommages-Ouvrage ? Dans quel but ?
Le point avec cet article.
Petit rappel sur l’assurance Dommages-Ouvrage
L'assurance Dommages-Ouvrage est une assurance obligatoire que doit souscrire tout maître d'ouvrage dans le cadre de travaux de rénovation ou de construction.
Le maître d’ouvrage est celui qui commande et finance les travaux.
Ainsi, le particulier doit également souscrire à cette assurance lorsqu’il fait intervenir un professionnel du bâtiment pour des travaux de rénovation ou dans le cadre d’une construction.
La loi dite « Spinetta » a rendu obligatoire la souscription de deux assurances : la Dommages-Ouvrage et la Responsabilité Civile Décennale (loi n°78-12 du 4 janvier 1978 relative à la responsabilité et à l'assurance dans le domaine de la construction).
L’assurance garantie décennale
La loi de 1978 a ainsi donné naissance à l’article 1792 du Code civil qui dispose que : « Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination. »
La garantie décennale s’applique pour le maître d’œuvre (celui qui effectue les travaux).
Par ailleurs, le maître d’ouvrage peut demander au maître d’œuvre une attestation d’assurance Responsabilité Civile Décennale avant le démarrage des travaux.
L’assurance Dommages-Ouvrage
La loi Spinetta est également à l’origine de l’article L242-1 du Code des assurances qui prévoit la souscription, avant l’ouverture du chantier, par toute personne physique ou morale agissant en qualité de propriétaire de l’ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l’ouvrage et faisant réaliser des travaux de construction, d’une assurance « garantissant, en dehors de toute recherche des responsabilités, le paiement de la totalité des travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1, les fabricants et importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du code civil. »
Il incombe ainsi au maître d’ouvrage de souscrire à l’assurance Dommages-Ouvrage avant l’ouverture du chantier.
Tout comme la garantie décennale du constructeur, l’assurance Dommages-Ouvrage protège le maître d’ouvrage d’éventuelles malfaçons de nature décennale pour une durée de dix ans suivant la date de réception du chantier.
Le principe est simple : l’assurance Dommages-ouvrage permet une prise en charge de l’indemnisation du maître d’ouvrage pour une réparation de dommage avant même de déterminer les responsabilités.
En l’absence de souscription à l’assurance Dommages-Ouvrage, vos travaux de réparation ne seront donc pas couverts en cas de sinistre. Il vous appartiendra d’engager la responsabilité décennale du constructeur pour prise en charge éventuelle.
Ces deux assurances couvrent ainsi les mêmes dommages, mais l’une protège le maître d’œuvre tandis que l’autre protège le maître d’ouvrage (Consultez notre article : « CONSTRUCTION : Comprendre l’intérêt et le fonctionnement de l’assurance Dommages-Ouvrage »).
Le process pour mobiliser la Dommages-Ouvrage et les délais applicables
La déclaration de sinistre
Si vous constatez un dommage qui porte atteinte à la solidité de l'ouvrage ou qui le rend impropre à sa destination (conformément aux dispositions de l’article 1792 du Code civil), vous pouvez mettre en œuvre l’assurance Dommages-Ouvrage.
Pour mettre en œuvre votre assurance Dommages-Ouvrage, il convient au préalable d’effectuer une déclaration de sinistre par lettre recommandée avec accusé de réception laquelle doit comporter certaines mentions obligatoires listées à l’annexe II de l’article A243-1 du Code des assurances (notamment la date d’apparition des dommages, leur description et leur localisation).
Les délais
La déclaration de sinistre doit être effectuée dans le délai de prescription de deux ans à compter de la survenance du sinistre, et de cinq ans pour les dommages résultant de mouvements de terrains consécutifs à la sécheresse-réhydratation des sols et reconnus comme une catastrophe naturelle (art. L114-1 du Code des assurances).
Ensuite, plusieurs délais commencent à courir pour l’assureur à compter de la réception de la déclaration de sinistre.
Tout d’abord, l’assureur dispose d’un délai de dix jours à compter de la réception de la déclaration pour contester la validité de cette dernière.
Ensuite, l’assureur dispose d’un délai de soixante jours à compter de la réception de la déclaration pour notifier à l'assuré sa décision quant au principe de la mise en jeu des garanties prévues au contrat et mettre en place une expertise amiable.
Procédure d’expertise d’assurance
Une fois la déclaration de sinistre effectuée et prise en compte, une expertise amiable se déroulera au contradictoire des parties.
L’assureur Dommages-Ouvrage désigne un expert avec pour mission de constater et d'évaluer le dommage. Cette phase d'expertise initiale est obligatoire.
La description des désordres est un point important puisque seuls les dommages déclarés seront examinés par l’expert mandaté.
La mission de l’expert est de constater, décrire, d’évaluer les désordres et d’apprécier la gravité afin d’établir un rapport préliminaire permettant de fournir à l’assureur les éléments nécessaires à sa prise de position.
- Rapport préliminaire
Dans le délai de soixante jours à compter de la déclaration de sinistre, l'expert doit déposer son rapport préliminaire et l'assureur doit le communiquer à l'assuré préalablement ou au plus tard le jour où il lui notifie sa décision sur la mise en jeu des garanties du contrat (annexe II art. 243-1 Code des assurances).
Ce rapport préliminaire contient une description et une analyse technique des dommages, indique les mesures conservatoires à prendre pour éviter l’aggravation des dommages, et comporte une estimation du chiffrage des travaux réparatoires.
- Rapport définitif
Dans le cas où l’assureur reconnait sa garantie, l’expert rédige ensuite un rapport définitif « exclusivement consacré à la définition des caractéristiques technique du sinistre et à l’établissement des propositions, descriptions et estimations, concernant les différentes mesures à prendre et les différents travaux à exécuter en vue de la réparation intégrale des dommages constatés » (annexe II art. A243-1 Code des assurances).
Ce rapport définitif inclut les mesures définitives pour la réparation des dommages ainsi que l’estimation du coût des travaux.
L’indemnité d’assurance
Une fois le rapport définitif rendu par l’expert, l’assureur propose une indemnité à l’assuré devant permettre une réparation définitive des désordres dans les quatre-vingt-dix jours suivant la réception de la déclaration de sinistre (art L242-1 Code des assurances).
En cas d'acceptation par l'assuré du montant de l’indemnité définitive, le règlement de cette somme par l'assureur doit intervenir dans un délai de quinze jours.
A noter que l’assuré doit consacrer cette indemnité uniquement aux fins de réparation des désordres, à défaut de quoi l’assureur Dommages-Ouvrage peut demander la restitution de cette dernière (Cour de Cassation, Chambre civile 3, du 17 décembre 2003, 02-19.034).
Ainsi, en souscrivant à une assurance Dommages-Ouvrage, en cas de sinistre, vous pouvez être indemnisé dans un délai maximal de cent cinq jours à compter de votre déclaration de sinistre, ce qui vous évite de devoir avancer les frais de réparation des désordres et d’attendre les délais judiciaires pour voir le cas échéant la responsabilité engagée du constructeur au titre de sa responsabilité décennale.
L’éventuelle contestation
L’assuré peut contester judiciairement la position de l’assureur dans l’hypothèse où l’assureur refuse de garantir le sinistre, ou encore si le montant de l’indemnité proposée dans le délai de quatre-vingt-dix jours ne lui semble pas satisfaisant au regard des travaux de réparation.
Refus d’indemnité
Dans le cas où l’assureur ne reconnait pas sa garantie, l’assuré a la possibilité de contester la position de non garantie de l’assureur, et ce dans le délai de deux ans de l’article L. 114-1 du Code des assurances.
Face à un refus de prise en charge par l’assurance, l’assuré peut engager une procédure de référé expertise auprès de la juridiction du lieu où est situé le bien immobilier aux fins de demander la désignation d’un Expert judiciaire qui pourra constater les désordres, en déterminer la cause et chiffrer le montant des travaux à effectuer. Le recours à un Avocat est indispensable pour cette procédure de référé expertise.
A l’issue de la procédure d’expertise judiciaire (d’une durée d’un an environ), l’Expert judiciaire rendra son rapport définitif.
En fonction de la teneur du rapport d’expertise, l’assuré pourra ensuite assigner l’assureur Dommages-Ouvrage devant le Juge du fond aux fins d’engager sa responsabilité.
Consultez notre article : « comment se déroule une expertise judiciaire ? »
Indemnité accordée
En cas de reconnaissance de garantie mais d’une proposition indemnitaire insuffisante, il résulte de l’article 2240 du Code civil que le point de départ pour agir en justice est fixé à la date de la proposition indemnitaire par l’assureur.
Si l'assuré conteste le montant de l'indemnité définitive, il peut solliciter une proposition plus raisonnable. L’assuré peut lui demander une avance égale aux trois quarts de l’indemnité proposée en attendant que le litige soit tranché conformément aux dispositions de l’annexe II de l’article A243-1 du Code des assurances lesquelles prévoient que « l'assuré qui a fait connaître à l'assureur qu'il n'acquiesce pas aux propositions de règlement dont il a été saisi, s'il estime ne pas devoir cependant différer l'exécution des travaux de réparation, reçoit sur sa demande, de l'assureur, sans préjudice des décisions éventuelles de justice à intervenir sur le fond, une avance au moins égale aux trois quarts du montant de l'indemnité qui lui a été notifié. »
Si vous avez des questions ou un litige, Me Louise BARGIBANT se tient à votre disposition, n'hésitez pas à la contacter.
Article rédigé par Virginie MARTEL, assistante juridique LBA AVOCATS
Sous la direction de Me Louise BARGIBANT
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