Règlement amiable du litige : « Un mauvais arrangement vaut mieux qu'un bon procès » ?
Un procès est parfois nécessaire voire indispensable pour préserver vos intérêts ou faire valoir vos droits.
En effet, le Juge va pouvoir « trancher » le différend que vous rencontrez avec un locataire, avec un associé, avec un fournisseur, avec un constructeur etc...
Néanmoins, les voies juridictionnelles peuvent parfois s’avérer contraignantes et délicates dans la mesure où existe toujours un « aléa judiciaire ».
Aussi, avant d’envisager le « procès », il est parfois possible d’envisager au préalable une « issue négociée » afin de sortir à l’amiable d’un dossier.
Honoré de Balzac a même été jusqu’à affirmer qu'« un mauvais arrangement vaut mieux qu'un bon procès ! ».
Cette citation est à prendre avec recul car un acte transactionnel s’il est « mauvais » pourra engendrer des conséquences fâcheuses pour vous que vous n'aurez peut-être pas eues avec une décision de Justice.
En tout état de cause, l’objet de cet article n’est pas de faire le procès de la Justice souvent vue comme lente, complexe ou encore trop coûteuse, mais avant tout de rappeler qu’il peut, dans certains dossiers, être intéressant d’envisager la recherche d’un accord amiable et qu'à ce titre, pour adapter la formule de Balzac, mieux vaut un bon arrangement qu'un mauvais procès.
Envisager le règlement amiable des différends
Avant de saisir un tribunal, il est important de réfléchir à l’éventualité d’une sortie amiable d’un différend.
La démarche peut ainsi être spontanée, à l’initiative d’une des parties.
En effet, afin d’éviter la voie juridictionnelle, vous pouvez choisir de discuter au préalable avec l’autre partie.
Cette discussion doit être « éclairée » et elle sera d’autant plus fructueuse si elle passe par le canal d’un avocat qui vous rappellera les droits et les obligations des parties avant d’envisager les négociations amiables.
La démarche peut également être obligatoire.
En effet, d’une part, il existe désormais une obligation générale de tenter des négociations amiables.
A ce titre, l’article 56 du Code de procédure civile rappelle que, par principe, l’acte qui saisit le Tribunal (l’assignation) doit « précise[r] également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige. ».
Aussi, il est recommandé à la partie qui est susceptible d'agir en justice de se prémunir de la preuve qu'elle a tenté la recherche de la solution amiable du différend.
Ceci peut être fait par échange de courriers, courriels etc.
Ces courriers de tentatives de discussions amiables peuvent également être envoyés par votre avocat.
D’autre part, il existe des « obligations spéciales » de règlement amiable du différend.
En effet, les parties sont dans l'obligation de tenter le règlement amiable de leur litige lorsqu'une disposition légale le leur impose.
De plus, en matière contractuelle, une clause de règlement amiable préalable obligatoire est parfois insérée dans le contrat litigieux.
Aussi, il est fréquent de trouver ce type de clause dans un contrat : « En cas de litige, les deux parties conviennent d'épuiser toutes les solutions amiables avant de les porter devant le tribunal de… »
Ces démarches amiables, qu’elles soient obligatoires ou facultatives, doivent en tout état de cause être envisagées dans l’objectif d’aboutir à une transaction.
La transaction
La transaction est définie à l’article 2044 du Code civil comme étant « un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.
S’agissant des conditions de forme de la transaction, l’article 2044 du Code Civil exige que la transaction soit écrite.
S’agissant des conditions de fond, il faut noter que pour qu’une transaction soit reconnue, elle doit comprendre trois éléments :
- une situation litigieuse ;
- l’intention des parties d'y mettre fin ;
- des concessions réciproques consenties à cette fin.
La transaction doit donc porter sur une situation litigieuse c’est-à-dire une contestation née ou à naître.
Ainsi, on distingue les transactions extrajudiciaires, qui interviennent avant l'introduction de toute instance, et les transactions judiciaires, qui peuvent intervenir en cours d'instance, mais avant qu'une décision définitive n'ait été rendue.
La transaction doit également traduire l’intention des parties de mettre fin au différend. Il est en effet logique que si cette intention fait défaut, l'accord intervenu entre les parties n'est pas une transaction.
L'acte transactionnel, pour être valable, doit enfin comporter de réelles concessions réciproques et en préciser la nature.
Le mot concession implique une renonciation à une partie de ce qu'une partie prétend être son droit.
La Cour de cassation estime que chaque contractant doit, par la transaction, renoncer à une partie au moins de ses droits, actions ou prétentions (Cass. civ. 3 mai 2000 : RJDA 7-8/00 n° 815).
Concernant la réciprocité, la jurisprudence rappelle que les concessions n’ont pas à être nécessairement d’une stricte proportionnalité mais qu’en revanche, elles ne doivent pas être dérisoires.
En tout état de cause, il faut que le consentement à la transaction soit libre et éclairé. La transaction doit être exempte de vices du consentement (dol, violence, erreur).
La transaction a des effets importants et le principal étant que : « La transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet » (article 2052 du Code civil).
Le rôle de l’avocat
L’avocat est tenu d’un devoir de conseil tout au long de la mission qu'il mène pour le compte de son client.
Ce devoir de conseil consiste à orienter la décision du client sur ses différentes demandes, sur les voies et moyens utilisables, à évaluer les options envisageables, à apprécier les chances de succès, à mettre en garde sur les risques d'échec, sur les incertitudes du droit positif et en particulier de la jurisprudence, etc.
Dans ce cadre, l’avocat doit présenter à son client les possibilités non contentieuses envisageables.
L’avocat peut également mettre en oeuvre les négociations amiables lesquelles seront confidentielles s’il correspond directement avec l’avocat de la partie adverse (les correspondances entre avocats sont confidentielles et ne peuvent être produites en Justice).
Le rôle de l’avocat ne doit donc pas se limiter à celui de vous représenter devant le Tribunal.
Il est bien plus large et le passage par un avocat peut parfois éviter un mauvais procès et permettre au contraire "un bon arrangement" par l'intermédiaire de négociations et d'une transaction réussie.
Article rédigé par Maître Louise BARGIBANT
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