COPROPRIETE : Comment et pourquoi contester une résolution d’AG des copropriétaires ?
Lorsqu’un immeuble bâti comporte des éléments collectifs dont la propriété et l'usage appartiennent à l'ensemble des propriétaires de locaux privatifs, il est bien souvent géré et organisé en « Copropriété ».
Il faut entendre par là le statut de la copropriété tel qu'il résulte de la loi du 10 juillet 1965 laquelle comporte en grande partie des dispositions impératives (c’est-à-dire auxquelles on ne peut déroger).
La Copropriété implique des droits et des obligations pour les copropriétaires.
Les copropriétaires sont par l'effet de la loi groupés dans un syndicat qui a la personnalité morale : le syndicat des copropriétaires.
Les décisions du syndicat sont prises en assemblée générale («AG ») des copropriétaires : soit en « assemblée générale ordinaire » qui est l'assemblée annuelle obligatoire (statuant notamment sur les comptes de la copropriété) soit en « assemblée générale extraordinaire » (pouvant être convoquée chaque fois que la bonne administration de l'immeuble nécessite une décision ne pouvant pas attendre la prochaine assemblée annuelle).
Les décisions prises en AG peuvent parfois être contestées par un copropriétaire.
Vous êtes copropriétaire mécontent d’une résolution prise en AG et souhaitez la contester : comment faire ?
Vous souhaitez réclamer l’annulation d’une résolution ou d’une AG dans sa globalité : comment procèder et dans quel délai ?
L’objectif de cet article est de vous préciser les règles en la matière.
Que pouvez-vous contester ?
Tout d’abord, il faut savoir que seules les délibérations de l'assemblée présentant le caractère de « décision » peuvent être contestées.
La loi ne précisant pas ce qu'est une décision d'assemblée générale, la jurisprudence est venue définir la « décision » comme étant « une question soumise à la délibération de l'assemblée générale et sanctionnée par un vote ».
Ainsi, ce qui est mentionné dans le procès-verbal d'une AG ne constitue pas nécessairement une « décision » contestable car il faut un engagement avec un vote exprès.
A titre d’illustration, selon la jurisprudence, un « donné acte » n’est pas une décision au sens de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965.
Par ailleurs, il faut savoir que des décisions ne peuvent être prises que sur les questions inscrites à l'ordre du jour : toute délibération intervenant sur une question non inscrite à l'ordre du jour, ou mentionnée comme ne devant pas faire l'objet d'un vote, est irrégulière, même si elle ne constitue que le rappel d'une clause du règlement de copropriété ou de décisions antérieures et peut faire l'objet d'une demande d'annulation.
Enfin, il est important de noter que seules les décisions ne conférant pas de droits acquis à un copropriétaire peuvent être contestées.
Qui peut contester ?
Seuls les copropriétaires opposants ou défaillants peuvent contester.
En effet, les copropriétaires qui ont voté pour la résolution adoptée ou contre une résolution rejetée ne sont pas admis à la contester, quelle que soit la gravité de l'irrégularité constatée.
Attention les abstentionnistes ne sont pas considérés comme opposants ou défaillants
Quels motifs de contestation ?
Pour contester et faire annuler une décision de l’AG, il faut prouver qu’une irrégularité a été commise.
Les causes d’irrégularité sont très nombreuses.
Il peut s’agir d’une irrégularité de forme.
A titre d’illustrations, il peut s’agir de la résolution qui n’a pas été adoptée à la bonne majorité ou encore de la question qui ne figurait pas à l’ordre du jour, de l’absence d’envoi des documents obligatoires aux copropriétaires.
Parfois, c’est même toute l’AG qui sera annulée par exemple lorsque la convocation n’a pas été faite dans les règles ou encore lorsqu’un copropriétaire n’a pas été convoqué.
Il peut également s’agir d’une irrégularité de fond : par exemple la contestation de décisions affectées d'un grave vice de fond tel qu'une atteinte aux droits de jouissance des copropriétaires sur leur bien.
Par ailleurs, la décision du syndicat devant satisfaire l'intérêt général des copropriétaires sera annulable si elle a été dictée dans un but frauduleux ou par le biais d'un abus de majorité.
L’abus de majorité sera caractérisé pour « une décision de l'assemblée contraire aux intérêts collectifs des copropriétaires ou prise dans le seul but de favoriser des intérêts personnels des copropriétaires majoritaires au détriment des copropriétaires minoritaires ».
En revanche, est vouée à l'échec l'action en annulation fondée sur l'inopportunité d'une décision de l'assemblée générale.
Quel délai pour agir contre une résolution d’AG ?
L'action en contestation doit être introduite à peine de déchéance dans un délai de deux mois à compter de la notification du procès-verbal d'assemblée qui doit être faite à la diligence du syndic.
La notification de la décision de l'assemblée générale aux copropriétaires opposants ou défaillants doit résulter d'un acte d'huissier de justice ou d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou d’une lettre recommandée électronique dans les conditions prévues par les articles R. 53 à R. 53-4 du code des postes et des communications électroniques ou au moyen d'un procédé électronique mis en œuvre par l'intermédiaire d'un prestataire de services de confiance qualifié et garantissant l'intégrité des données.
En cas d'absence de notification ou si le procès-verbal n'a pas été notifié dans les formes requises, les copropriétaires peuvent contester les décisions de l'assemblée pendant cinq ans.
Il faut donc faire son recours devant le tribunal judiciaire par assignation signifiée dans les deux mois de la notification.
Que peut faire le tribunal ?
Le tribunal, saisi d'une demande d'annulation d'une décision, doit apprécier sa régularité ou son irrégularité.
Il ne peut l'annuler que s'il considère qu'elle est irrégulière au regard des dispositions légales ou conventionnelles.
Il ne peut cependant pas apprécier l'opportunité des décisions d'assemblée légalement prises et substituer sa propre appréciation à celle des copropriétaires en l'absence d'abus de majorité.
Une décision bien qu'intervenue dans des formes régulières peut être susceptible d'un recours en annulation lorsqu'elle lèse un ou plusieurs copropriétaires sans pour autant être conforme à l'intérêt commun. Il faudra alors prouver l'abus commis et le préjudice injustement infligé à une minorité.
A noter toutefois, le juge qui prononcera la nullité d'une résolution prise en assemblée générale ne pourra se substituer à l'organe délibérant pour imposer une autre décision, ce qui serait une immixtion injustifiée dans l'administration de l'immeuble.
Il pourra toutefois accorder des dommages-intérêts au copropriétaire.
Attention enfin, si le tribunal considère le recours comme étant abusif, une amende civile peut être prononcée voire des dommages-intérêts pour avoir voulu perturber le bon fonctionnement de la collectivité.
Si vous envisagez un recours contre une décision d’assemblée générale de copropriétaires et que vous souhaitez que Me Louise BARGIBANT vous conseille sur l’opportunité d’un recours et ses chances de succès, n'hésitez pas à la contacter.
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