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Assurance dommages-ouvrage : une assurance fondamentale pour le Maître d'Ouvrage

Vous êtes un Maître d’ouvrage et vous avez fait réaliser des travaux par un constructeur.

Toutefois, ces travaux ne sont pas conformes à vos attentes et rendent l’ouvrage impropre à sa destination.

Dans cette situation, il est normal que vous souhaitiez obtenir réparation du préjudice subi et ce le plus rapidement possible.

L’assurance D-O (dommages-ouvrage) permet au bénéficiaire de préfinancer les travaux réparatoires dans un délai court sans faire de recherche préalable de responsabilité. Et ce n’est pas le seul avantage que présente cette assurance.

Retour sur la notion « d’assurance D-O », ses assujettis, son intérêt, son fonctionnement ainsi que sur la durée de la garantie.

Qui doit souscrire l'assurance D-O ?

Aux termes de l’article L. 242-1 du Code des assurances, l’assurance dommages-ouvrage doit être souscrite avant l’ouverture du chantier par toute personne physique ou morale qui, agissant en qualité de propriétaire de l'ouvrage, de vendeur ou de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, fait réaliser des travaux de construction.

Sur le plan pénal, commet une infraction celui qui ne satisfait pas à cette obligation de souscription : il risque un emprisonnement de six mois et une amende de 75 000 euros (ou l'une de ces deux peines).

Le défaut de souscription de l’assurance D-O n’est toutefois pas sanctionné pénalement pour la personne physique construisant un logement pour l'occuper elle-même ou le faire occuper par son conjoint, ses ascendants, ses descendants ou ceux de son conjoint, bien qu'assujettie aux obligations d'assurances ne peut être sanctionnée pénalement en cas de non-respect.

Sur le plan civil, le défaut d'assurance est une "faute civile". 

L'acquéreur du bien immobilier rénové ou construit par le vendeur sans D-O est en droit de se prévaloir sur une durée de dix ans de l'assurance de l'absence d'assurance obligatoire devant les juridictions civiles afin de demander, en cas de dommages graves survenant dans la période décennale, des dommages-intérêts contre le constructeur sur le fondement de la perte de chance d'être indemnisé en cas de sinistre. 

A noter que le défaut de souscription peut amener à de lourdes conséquences financières pour le maître d’ouvrage.

Quels ouvrages sont concernés par l’assurance D-O ?

A travers l’assurance D-O seuls les ouvrages visés par la police d’assurance sont garantis.

Les ouvrages doivent constituer des "travaux de construction".

Par conséquent, les ouvrages non réalisés ne sont pas couverts par l’assurance.

En revanche, la jurisprudence a étendu l’assurance D-O aux éléments d’équipement rendant l’ouvrage impropre à sa destination

Quels sont les dommages couverts par l’assurance D-O ?

Au sens de l’article L. 242-1 du Code des assurances, la garantie couvre les travaux de réparation des dommages de la nature de ceux dont sont responsables les constructeurs au sens de l'article 1792-1 du Code civil.  

Sont également couverts les dommages dont sont responsables les fabricants, les importateurs ou le contrôleur technique sur le fondement de l'article 1792 du code civil.

Concrètement, l’assurance D-O doit porter sur des dommages de nature décennale rendant l’ouvrage impropre à sa destination.

Cependant, les dommages immatériels tels que les troubles de jouissance sont exclus de la garantie.

De même, sont exclus de la garantie les dommages aux ouvrages antérieurs à l’ouverture du chantier, sauf ceux qui sont pleinement incorporés dans l’ouvrage neuf, en deviennent techniquement indivisibles.

Pourquoi il est recommandé de souscrire une assurance D-O ?

Cette assurance permet de préfinancer le sinistre et de mettre fin au désordre sans avoir à rechercher la responsabilité du constructeur.

L’article L. 242-1 du Code des assurances prévoit qu’une fois le sinistre déclaré, l’assureur dispose de 60 jours pour notifier sa décision de mise en œuvre de la garantie.

Si la réponse est favorable, l’assureur devra présenter dans un délai de seulement 90 jours une offre d’indemnité définitive destinée au paiement des travaux de réparation.

Etant une assurance de chose, elle suit le bien jusqu’à l’expiration de la garantie. Par conséquent, elle bénéficie de plein droit aux propriétaires successifs de l’ouvrage.

La transmission de l’assurance permet dans l’hypothèse d’une vente de l’immeuble de revoir le prix à la hausse.

A noter que l'absence d'assurance ne rend pas le bien indisponible à la vente puisqu'il ne s'agit pas d'un accessoire indispensable de l'immeuble vendu comme rappelé à plusieurs reprises par la Cour de cassation. Néanmoins, les conséquences de cette situation doivent être prises en compte par les deux parties lors de la vente immobilière, notamment quant à l'impossibilité d'obtenir un préfinancement des travaux de réparation en cas de sinistre, et l'absence d'assurance doit être mentionnée dans l'acte de vente. À défaut de porter une telle mention, le rédacteur de l'acte (notaire) engage sa responsabilité.

En cas de sinistre mais en l’absence d’assurance D-O, le maître d’ouvrage pourra tenter de mettre en œuvre l’assurance RCD du constructeur.

Cependant, l’assurance RCD du constructeur peut être défaillante.

Dans cette situation, le maitre d’ouvrage devra supporter personnellement tous les travaux de réparation ainsi que les mesures conservatoires du bien alors que si le maître d’ouvrage souscrit l’assurance D-O, toutes les dépenses précitées seraient prises en charge par l’assureur.

Après avoir indemnisé le maître d'ouvrage, il appartient à l'assureur D-O d'exercer un recours subrogatoire contre le constructeur.

Cela permet au maître d’ouvrage d’éviter toute procédure judiciaire ainsi que les frais y afférents.

Malgré son coût élevé l’assurance D-O est une véritable protection pour le maître d’ouvrage.

Comment fonctionne l’assurance D-O ?

La déclaration du sinistre à l’assureur déclenche une phase d’expertise amiable obligatoire.

L’expert est désigné par la compagnie d’assurance, il a pour mission de constater et d’évaluer le dommage.

Toutefois, l’annexe II de l’article A.243-1 du Code des assurances exclut le recours à un expert :

  • Pour les dommages évalués à un montant inférieur à 1 800 euros
  • Lorsque la mise en jeu de la garantie est manifestement injustifiée

Dans ces deux situations, l’assureur doit notifier à l’assuré son refus de garantie dans les 15 jours à compter de la réception de la déclaration du sinistre.  

En l’absence de notification, la garantie est réputée acquise.

En temps normal, lorsque l’assureur décide de refuser sa garantie, ce refus doit faire l’objet d’une décision motivée et intervenir dans un délai de 60 jours.

Lorsque l’assureur ne respecte pas la procédure d’indemnisation ou que l’offre d’indemnisation ne paraît suffisante à l’assuré, ce dernier peut exercer une action en justice.

L’assureur pourra être condamné à verser une indemnité augmentée d’un intérêt égal au double taux de l’intérêt légal.

Attention aux délais

En matière d’assurance D-O, la déclaration du sinistre et l’action du maître d’ouvrage doivent intervenir dans un délai de 2 ans à compter de la connaissance qu’il a des désordres survenus dans les 10 ans qui ont suivi la réception des travaux.

Ainsi, si l’assuré a connaissance du désordre juste avant la fin de la garantie décennale, son assureur peut être conduit à prendre en charge le sinistre après l’expiration décennale.

A titre d’illustration, le 4 novembre 1992 la 1er chambre civile de la Cour de cassation a estime qu’un délai d’un mois avant l’expiration délai décennal laisse un temps suffisant à l’assureur D-O.

Toutefois, la haute juridiction a plafonné le délai de prescription à 12 ans ainsi toute déclaration de l’assuré après ce délai est irrecevable.

De plus, si l’assuré ne fait pas preuve de diligence pour préserver l’action subrogatoire de l’assureur en déclarant le sinistre tardivement, l’article L. 121-12 alinéa 12 du Code des assurances prévoit que l’assureur peut refuser sa garantie à l’assuré, si ce dernier lui fait perdre le bénéfice de la subrogation.

Aussi, le maître d’ouvrage doit être réactif pour mobiliser cette assurance dont la garantie peut être précieuse en cas de dommage décennal.

Article rédigé par Marcio LOPES, stagiaire LBA Avocat

Sous la direction de Maître Louise BARGIBANT

 

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